Dans l’après-midi du 26 décembre 1957 dans une ferme près de Tétouan au Maroc, 52 années après la Kabylie unie n’est pas prêt d’oublier l’ « Anza » (dernier râle que pousse un supplicié avant de rendre l’âme) de son meilleur des fils, en la personne de Ramdane Abane (1920-1957). En effet, plus d’un demi-siècle la Kabylie se rappellera toujours de cette date du 26 décembre 1957 où le clan d’Oujda, actuellement au pouvoir de cette «Algérie » totalement inféodée aux puissances étrangères, eut froidement décidé de l’élimination physique de l’Architecte de la Révolution Algérienne, Abane Ramdane.
Cet homme politique kabyle d’exception dont le seul tort était de surpasser par sa vive intelligence politique tous les hommes de sa génération dans la conduite de la guerre de libération nationale algérienne et de tracer les grandes lignes du mouvement révolutionnaire consistant à créer un Nouvel État Algérien dans lequel l’élément politique l’emporte sur l’élément militaire, prônant ainsi le pluralisme politique et linguistique en Algérie, en consacrant pour la première fois dans les textes le principe de l’Algérie Algérienne. La récente pseudocrise Égypto-algérienne a brutalement rappelé à tous les citoyens d’Algérie, qui cultivent encore le sens de la souveraineté de leur État, combien ils sont encore loin de cet idéal d’État moderne dont ils rêvent encore et dont avaient pourtant tracé les contours Abane, il y a plus d’un demi-siècle de cela. Malheureusement pour eux, c’est par ce que Abane était KABYLE qu’il fut éliminé physiquement avant de concrétiser son projet historique. Au lieu et place d’une véritable république moderne et citoyenne, les citoyens d’Algérie se sont suffi d’un État archaïque complètement inféodé aux puissances étrangères et un gouvernement dont la logique de fonctionnement n’a rien à envier aux plus lugubres et sinistres sectes du moyen-âge. Ce fut le faramineux prix du sang que durent payer les pseudocitoyens d’Algérie.
Ainsi, « Abane Ramdane dérangeait beaucoup de monde, c’est pour cela qu’il a été assassiné », a déclaré l’ancien chef de gouvernement Belaïd Abdeslam, il y a quatre ans, lors d’une conférence qu’il avait animée au forum d’El Moudjahid à Alger. « Vu sa personnalité et sa persévérance, Abane commençait à s’imposer comme le leader de la révolution, ce qui n’a pas été du goût de certains », avait-il expliqué. Pourquoi ? Pourtant, il s’était engagé dans la révolution algérienne cœur et âme au point même de stigmatiser et d’isoler les « berbéristes » irrédentistes encore présents au sein de la Fédération de France. C’est parce qu’il est uniquement Kabyle !
Les détracteurs d’Abane le qualifiaient, expliquait, il y a plus de 10 ans de cela, l’ancien président Ben Youcef Benkhedda, tantôt de «régionaliste » , hostile à « l’arabo-islamisme », tantôt d’« autoritariste », voire par certains d’« agent de l’ennemi », de « traître ». En clair, on faisait mine de l’accuser de tout, sauf du véritable chef d’inculpation : sa Kabylité ! Il est kabyle et doué (donc, potentiellement inaliénable ni à l’Occident ni à l’Orient) et cela fut suffisant pour lui ourdir un complot pour l’éliminer physiquement !
Cinquante-deux ans après le crime abject de Tétouan, certains pseudo « acteurs » de la révolution hantés par les cris de Tétouan, n’ont pas hésité à s’attaquer à la mémoire de l’architecte de la révolution algérienne et néanmoins initiateur du congrès de la Soummam. Ainsi, c’est l’ancien président du Haut Comité d’État (HCE), Ali Kafi, qui a inauguré la série d’attaques contre Abane. La campagne orchestrée par l’ancien patron de l’O.N.M. visait à souiller la mémoire d’un héros qui, en 1956, avait réussi à rassembler les chefs des régions militaires autour d’une plate-forme fondatrice de l’État algérien. Ali Kafi présentait dans ses Mémoires intitulées « Du militant politique au dirigeant militaire », Abane Ramdane comme un despote qui ne cherchait qu’à « étendre son pouvoir sur la révolution et à arracher ses leviers de commande à la délégation extérieure ». D’ailleurs, selon l’auteur, Abane Ramdane n’avait ni une orientation de gauche ni des ambitions idéologiques. L’ancien président de l’O.N.M. ne s’est pas arrêté là, il est allé plus loin dans ses accusations en remettant en cause y compris l’engagement militant d’Abane. Selon M. Kafi, « Abane avait des contacts secrets avec l’ennemi qu’il n’avait pas divulgués à ses collègues dans la direction jusqu’à ce qu’ils les aient découverts par leurs efforts et leurs propres moyens ». En effet, pour tuer son chien, on l’accuse de la rage, dit le dicton. Dans sa volonté de justifier l’assassinat de l’organisateur du congrès de la Soummam, Ali Kafi écrit, que c’est pour donner suite « aux soupçons qui ont entouré Abane », que ses collègues l’ont persuadé d’aller avec eux au Maroc sous prétexte de rencontrer le roi Mohammed V.
« Là il fut jugé et exécuté », souligne l’ancien président du H.C.E. qui ne cache pas sa haine viscérale contre Abane. Pour sa part, il y a 7 ans de cela, le pion des services secrets égyptiens, Ahmed Ben Bella pour ne pas le nommer, avait affirmé, sur une chaîne arabe (El Djazira), qu’« Abane Ramdane n’a jamais été dans le premier noyau qui a initié la guerre de libération. Il n’a jamais fait partie de l’Organisation spéciale (OS) ». Peu de voix algériennes, hormis des voix kabyles, sont élevées pour clouer le bec à cet imposteur ! Pour rappel, le chef d’inculpation qui avait été retenu par la justice française lors de l’arrestation d’Abane en 1951 était son appartenance à l’O.S ! Lors de cette émission télévisée, l’ancien président algérien réaffirmait notamment ses accusations contre Abane Ramdane qu’il décrivait comme un agent de la France!
Pis, Ben Bella affirmait que « Abane était en relation avec le gouvernement français », qui explique que « c’est ce qui a conduit à neutraliser Abane puis à l’exécuter (à l’assassiner en réalité pour être cohérent avec les formes) au Maroc ». Une manière pour l’ancien président déchu de justifier l’assassinat d’Abane. Ces accusations ont soulevé un tollé de protestations de l’ensemble de la Kabylie pour dénoncer ces propos injurieux et calomnieux. Cinquante-deux ans après l’assassinat de l’enfant d’Iazzuzen, son œuvre, sa conception de l’État, son intelligence politique, son franc-parler, sa résistance, son militantisme et son engagement dérangent encore certains dirigeants et responsables. Même mort, Abane Ramdane continue à faire peur aux usurpateurs de la souveraineté populaire et autres imposteurs de la révolution.
La Kabylie autonome n’oubliera jamais le sacrifice des meilleurs de ses fils et l’honorera tous les 26 décembre de chaque année afin que nul Kabyle n’oublie sa figure généreuse, son dévouement et son sacrifice pour doter l’ensemble algérien d’un État libre moderne inféodé à aucune officine étrangère. La Kabylie autonome plus que jamais est aujourd’hui déterminée à imposer son autonomie régionale sur le terrain pour soustraire sa personnalité identitaire, culturelle, linguistique et historique de la flétrissure dont s’est ligué le Clan d’Oujda, assassin d’Abane Ramdane pour s’accaparer par trahison du pouvoir absolu de l’État. La Kabylie se relèvera comme un seul homme et demandera des comptes pour le sang versé par ses fils.
L’État régional kabyle n’oubliera jamais ses martyrs, ceux d’hier, ceux d’aujourd’hui et ceux de demain. Il les honorera tant que durera l’histoire !